Mohamed Ali Eltaher
 

Biographie

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. . . PUIS VERS ISRAËL ET LA PALESTINE ? OU AUTRE ?

Préparer le terrain pour l’avenir

Avoir le regard fixé sur l’avenir offrirait certainement une meilleure chance d’atteindre l’objectif que de prétendre avancer les yeux fixés sur le rétroviseur ! Le peuple juif est « rentré de la diaspora » pour vivre en paix sur la terre de Sion. La paix pour eux, et, espérons le, pour les autres aussi ! Aujourd’hui, les Palestiniens vivent leur propre diaspora à l’intérieur et à l’extérieur de leur pays ancestral. Eux aussi recherchent la même paix. Ils ont besoin de faire Aliyah, tout comme les Juifs.

Les événements tragiques qui ont cicatrisé l’histoire des Palestiniens et des Israéliens au cours des cents dernières années sont bien pénibles pour les deux peuples et nécessitent un rétablissement assisté graduel, au cas où les deux peuples souhaitent et peuvent tracer leur chemin ensemble librement et honnêtement. Si, par contre, ils sont incapables de le faire, et pis encore, s’ils ne veulent pas rajuster leur approche, ils pourront alors oublier la paix, et tout le monde y perdra au change.

Plusieurs écrivains israéliens, parfois décrits par leurs détracteurs comme des «révisionnistes», ont en général examiné le problème depuis toujours d’une façon académique et bien balancée.33 D’autres sont incapables de se libérer de leurs préjugés et parfois de leur aveuglement prémédité, et de leur incapacité de considérer que la souffrance est une condition humaine (et même animale) universelle, et non seulement le monopole du peuple juif.

La situation est semblable dans le camp arabe où il existe une bonne dose d’auto-aveuglement quant aux faits, surtout parmi les responsables. Les modèles qu’on peut rencontrer dans les deux camps sont prisonniers de leur verbe qu’ils adorent conjuguer, qu’il soit basé sur des faits ou non, et sans tenir compte de l’effet négatif qu’il pourrait avoir même à l’encontre de leur propre intérêt. Ce modèle d’individus pose un danger mortel pour tout arrangement accommodant les deux parties ou pour la paix entre Palestiniens, Israéliens et Arabes, et même tous ceux qui ont intérêt à ce que règne la paix dans le monde. Grâce à ce genre d’individus, il ne manquait pas trop de raisons pour que l’ancien processus de paix, les feuilles de route et les accords intérimaires n’échouent, malgré la bonne volonté de nombreux d’autres qui ont la tête bien fixée sur les épaules et les pieds solidement posés au sol.

Répondant à sa propre question, « Pourquoi les accords d’Oslo ont-ils échoué ? »34, l’écrivain israélien Uri Avnery a écrit que « Dès le début, les accords étaient construits sur des bases qui n’étaient pas solides, parce qu’ils manquaient l’élément essentiel : une définition claire quant à l’objectif final du processus ». Avnery note encore que « (pour le leader palestinien Yasser) Arafat, il était évident que les « étapes intérimaires » aboutiraient à un état palestinien indépendant sur toute la Cisjordanie et la Bande de Gaza, avec peut-être un échange mineur de territoires. Jérusalem Est, y compris bien sûr les lieux saints, deviendrait la capitale de la Palestine, et les colonies seraient démantelées ». Et Avnery d’ajouter : « Je suis convaincu qu’(Arafat) aurait été satisfait par un retour symbolique dans Israël même d’un nombre limité de réfugiés. »

« Mais l’objectif  (du Premier Ministre Yitzhak) Rabin », selon Avnery, « n’était pas clair, peut-être même plus pour lui-même. En ce temps il n’était pas encore prêt pour accepter un état palestinien. Sans une destination finale, toutes les « phases intérimaires » sont allées de travers…Rabin était le fils de l’idéologie sioniste classique….Il portait dans son corps le code génétique du mouvement sioniste. Un mouvement dont le but dès le début était de transformer la Terre d’Israël exclusivement en un état juif, qui niait l’existence même d’un peuple arabe palestinien, et dont la logique ultime signifiait leur évacuation…Comme la plupart de sa génération dans le pays, il a absorbé cette idéologie avec le lait de sa mère, et c’est comme cela qu’il fut élevé tout au long. À la croisée des chemins de sa vie, il est tombé victime d’une contradiction interne sans issue : son jugement analytique le poussait vers la paix avec les Palestiniens, de « céder » une partie du pays, et de démanteler les colonies, alors que son héritage génétique sioniste s’opposait à tout cela avec toutes ses forces. Ceci s’est manifesté visiblement lors de la cérémonie de signature des accords d’Oslo: : il a offert la main à Arafat parce que son cerveau lui a donné le signal, mais tout son corps exprimait sa révolte. »

Avnery ne désempare pas dans son analyse quant à ce qui aurait mal tourné, mais il a proposé une solution lorsque vers la fin de l’article il a souligné “qu’il est impossible de faire la paix sans un modicum d’engagement mental et émotionnel. Impossible pour un mouvement historique de changer de direction sans repasser son histoire en revue. Impossible pour un leader de mener son peuple vers un changement radical (comme le leader Turc Kemal Atatürk l’a fait en Turquie par exemple) s’il n’était pas complètement dévoué au changement lui-même. Impossible de faire la paix avec un ennemi sans comprendre sa réalité. »

Malheureusement, enfin de compte, les forces internes ayant créé le climat pour l’assassinat (de Rabin) l’ont remporté, et les Israéliens de même que les Palestiniens ont perdu. Dans un monde globalisé, nous avons tous perdu.

Il serait possible d’ajouter que suite à des années où ne se sont produits que des actes de violence, ni les Israéliens ni les Palestiniens étaient « programmés » adéquatement pour savoir comment procéder pour établir la paix. D’autre part, il y avait dans les deux camps ceux qui s’opposaient au processus de paix sous toutes ses formes. Ils ne voulaient tout simplement pas entendre parler d’un accord ou d’un accommodement qui puisse prendre ‘l’autre’ en considération. Pour ces obstructionnistes, partager c’est perdre.

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